36 宣傳在第二次世界大戰中發揮了決定性作用。 作者:克里斯蒂安·D·埃爾波特

 36

La propagande a joué un rôle décisif pendant la Seconde Guerre mondiale

par Christian DELPORTE

Au sortir de la guerre, l’idée s’ancre, chez les vainqueurs, que la victoire résulte certes des armes, mais aussi de l’arsenal psychologique mis en œuvre pour faire voler en éclats la redoutable machine de propagande nazie. En France, on exalte le rôle décisif des émissions de la BBC et de la presse clandestine dans la résistance morale de la population, mais on frappe aussi ceux qui, par leur plume ou par leur voix, ont cherché à « démoraliser des Français », admettant ainsi la menace que représentait la propagande collaborationniste. Aux États-Unis, on multiplie les enquêtes destinées à évaluer l’impact de la propagande, en questionnant notamment les prisonniers allemands.


Que la Seconde Guerre mondiale ait marqué la « consécration » de la propagande, comme l’écrit Jacques Driencourt en 19501, nul n’en doute. Elle s’est déployée dans toutes les directions, vers la communauté nationale, qu’il fallait soutenir moralement, comme vers l’ennemi, qu’on s’appliquait à démoraliser, et ce avec des moyens considérables. Dans les pays dominés, la propagande de l’occupant et des gouvernements soumis a suscité une contre-propagande venue de l’étranger ou nourrie par l’action clandestine. À cet égard, la radio a joué un rôle essentiel, le propre des ondes étant de défier les frontières.


Pour autant, on peut douter que la propagande ait été aussi efficace, voire décisive, qu’on le crut à l’issue du conflit. En la matière, les instruments de mesure font largement défaut. Même les sondages, quand ils existent, ne permettent pas de conclure au lien mécanique entre le message de persuasion et l’attitude de l’opinion. De nombreux indices, au contraire, soulignent la portée très relative de la propagande. Comme l’écrivait Jean-Marie Domenach : « La propagande ne peut rien […] si elle ne rencontre pas un terrain favorable2. » Autrement dit, il est impossible de convaincre une population qui ne veut pas être convaincue, et plus encore de la « retourner », même avec les techniques les plus sophistiquées.


Dans la France occupée, la propagande ne « passe » pas

Prenons un premier cas de figure, celui d’un pays occupé comme la France, soumis à une propagande intense. En zone nord, la Propaganda Abteilung reprend les recettes développées en Allemagne ; en zone sud, les services de l’information de Vichy prétendent porter le message du Maréchal bien au-delà de la ligne de démarcation. Or, l’état d’esprit de l’opinion est connu, notamment grâce aux rapports de synthèse du contrôle postal – plus de 350 000 lettres ouvertes chaque semaine par la censure – et à ceux des préfets qui, à partir de 1941, comportent chaque mois une section « information et propagande » – signe de la confusion entre l’une et l’autre, mais aussi de l’importance que leur impact revêt aux yeux du gouvernement.


Si la défiance à l’endroit de l’occupant s’installe dès son arrivée, le décrochage vis-à-vis de Vichy se dessine dès le printemps 1941, comme l’a montré depuis longtemps l’historien Pierre Laborie3. Face « aux complications et à la précarité de la vie quotidienne », qui entretiennent « une nervosité et un mécontentement », la population de zone nord, alors, rejette la politique de collaboration, comme l’indiquent les rapports préfectoraux : « Plusieurs préfets reçoivent dans leur courrier de nombreuses lettres anonymes contenant la photographie déchirée du Maréchal4 » ; « Le Maréchal lui-même, dont le prestige était jusqu’à présent incontesté, voit sa popularité diminuer, en raison de son adhésion publiquement donnée à cette politique [de collaboration]5. » Le célèbre discours de Pétain sur le « vent mauvais », prononcé le 12 août 1941, signe tant le détachement de la population (qui débouchera sur la défiance puis l’hostilité) que l’impuissance de la propagande à maintenir la confiance. C’est pourtant à cette époque que l’appareil propagandiste de Vichy se structure. Sous la conduite de Paul Marion, il bâtit notamment un réseau de volontaires chargés de porter la bonne parole dans le pays6.


Dès septembre 1941, la synthèse préfectorale sur l’état de l’opinion en zone libre est sans appel : le public « n’accorde qu’un crédit limité aux nouvelles diffusées par la presse et la radio françaises, qui sont considérées comme contrôlées par les autorités allemandes ». Les mois défilent et confirment l’impression. Si, en zone nord, le public est « hostile » à la propagande, en zone sud il n’y accorde « aucun crédit », se montre « lassé » par elle ; bref, les préfets concluent à son « inefficacité ».


L’impuissance des médias de masse

En zone nord, où, dans son « immense majorité », la population est « braquée contre l’occupant »7, le tirage de la presse est artificiellement gonflé par les subsides allemands, mais ses bouillons (invendus) atteignent des proportions considérables. À cet égard, les journaux collaborationnistes battent des records de désaffection : 65 % d’invendus en juillet 1941 pour le quotidien doriotiste Le Cri du peuple, qui écoule à peine 10 000 exemplaires. Si la population achète néanmoins la presse, elle ne la lit, à Paris, que « pour les petites annonces, les faits divers et informations relatives au ravitaillement », et en province « on ne cherche que les informations locales »8. Se procurer le journal ne signifie pas qu’on adhère au discours, mais sa lecture reste utile, sinon indispensable, pour se tenir au courant des derniers règlements, de la distribution des tickets de rationnement, des heures du couvre-feu ou des coupures de gaz et d’électricité.


La situation est à peine plus favorable en zone sud, où les lecteurs des journaux, consternés par leur uniformité, persuadés « que les informations ne sont pas toujours conformes à la vérité9 », lisent essentiellement « les communiqués relatifs au ravitaillement ». Dans ces conditions, « les journalistes semblent être découragés par l’indifférence du public ».


Ce qui est vrai pour la presse l’est aussi pour la radio. Soumise aux Allemands, Radio-Paris reste « sans effet10 » sur les auditeurs. Quant à la propagande de la Radiodiffusion nationale (Vichy) – qui touche difficilement la zone occupée (Bretagne, Nord notamment), tant les émetteurs sont bridés par l’occupant –, elle fait sourire l’auditeur par ses boursouflures ou sa naïveté. En avril 1942, l’agacement du préfet du Tarn-et-Garonne pointe lorsqu’il « regrette que l’on se méprenne sur l’intelligence et sur le bon sens de la population française qui sont d’une assez honnête moyenne11 ». Et son collègue des Hautes-Pyrénées d’enfoncer le clou : « La majorité [des auditeurs] comprend parfaitement qu’on ne lui dit pas la vérité. » Si rien ne change, les « services de propagande française » n’auront plus « aucune audience »12.


Les salles de cinéma permettent elles aussi de mesurer la portée de la propagande. À Paris, les actualités filmées à la gloire de l’armée allemande provoquent tant de cris et de sifflets13 que l’occupant, en 1942, décide d’éclairer partiellement les salles durant leur projection. En zone sud, les préfets constatent : « Dans les cinémas, les actualités ne sont pas prises au sérieux14 » ; mieux, elles « arrivent à servir de contre-propagande ». Les délégués à la propagande sont-ils plus efficaces ? Pas vraiment. Le jugement des préfets est même sévère : ce sont des « amateurs15 », « des agents médiocres, d’une moralité douteuse16 ». Quant aux autres outils de propagande – affiches ou tracts –, les préfets les estiment totalement inutiles.


Non, rien ne passe. Il est même des sujets de propagande qui provoquent une plus franche hostilité que d’autres : la politique de collaboration, le discours anti-Alliés – et ce malgré les bombardements –, le STO, Laval… Que faire dès lors ? Les représentants de l’État de Vichy ont quelques idées sur ce point. Selon eux, le gros défaut de la propagande, c’est qu’elle vient d’en haut, qu’elle est excessive, bref, qu’elle se voit trop : dès que les Français la perçoivent, ils la fuient, et plus le temps avance, plus ils y repèrent la patte de l’occupant. Dès novembre 1941, la synthèse des rapports de préfets suggère d’« utiliser les méthodes mêmes du parti communiste », c’est-à-dire « la propagande de bouche à oreille dans les files d’attente ». La meilleure propagande, explique le préfet du Doubs, serait celle faite « sous le manteau », de manière « cachée »17.


L’illusion Henriot

Une lueur d’espoir se dessine pourtant, début 1944, dans les rapports préfectoraux, lorsque le nouveau ministre de l’Information, Philippe Henriot, s’installe sur Radio-Vichy pour délivrer ses deux éditoriaux quotidiens (relayés simultanément par onze postes en France, dont Radio-Paris). Si l’opinion reconnaît immédiatement dans l’ancien député de la Gironde l’instrument des Allemands, son éloquence attire les auditeurs. En février, « la quasi-unanimité des préfets constatent que, convaincus ou non, les Français écoutent, de plus en plus nombreux, les éditoriaux du ministre18 ». En juin, le préfet de la Vienne va plus loin : ses émissions, écrit-il, « sont toujours plus écoutées, même par de nombreux gaullistes ou sympathisants, la verve et le talent de l’orateur servent admirablement le gouvernement ». Son collègue de la Somme renchérit en parlant d’« heureuse influence sur l’opinion »19.


Difficile, ici, de faire la part entre la sincérité et le zèle des représentants de Vichy. Cependant, un autre éclairage est donné par un sondage clandestin de la Résistance, conduit dans le cadre du Service des sondages et statistiques créé par Max Barioux20. Sa fiabilité est évidemment sujette à caution, compte tenu des conditions particulières de son élaboration et bien que ses initiateurs aient cherché à s’appuyer sur un échantillon représentatif de la population française. Réalisé du 26 avril au 15 mai 1944 auprès de 426 « Français de naissance », à l’exception des « collaborateurs », il pose une unique question : « Est-ce que les discours de Philippe Henriot portent sur vous ? Si oui, de quelle façon et dans quel sens ? » Le « non » l’emporte largement avec 84 %, contre 10 % pour le « oui ». L’existence même d’un tel sondage souligne la crainte suscitée, dans les rangs de la Résistance, par la propagande du ministre de Pétain, au point qu’elle l’élimine le 28 juin 1944. Le texte d’analyse qui accompagne l’enquête insiste sur la « surprise » des résultats car, selon toutes les « apparences », « on croyait que les discours de Philippe Henriot portaient sur l’opinion publique française ». Mais en matière de propagande, audience ne signifie pas adhésion, et on a toujours tendance à croire qu’à défaut de peser sur soi, elle influence les autres. L’opinion, en 1944, est arrivée à un tel niveau de défiance que plus rien – même pas la propagande sur les bombardements alliés quotidiennement assénée pour nourrir la peur du débarquement – ne peut la rattacher à la politique de collaboration.


L’engrenage fondé sur la crainte

Le facteur déterminant qui explique le déploiement de la propagande est que tout le monde croit alors à son efficacité. Les démocraties en sont d’autant plus convaincues qu’elles lui attribuent un rôle majeur dans le succès des nazis en Allemagne. Craignant ses effets sur leurs propres populations, non seulement elles forgent des instruments d’encadrement de l’opinion (commissariat à l’Information en France en 1939, ministère de l’Information en Grande-Bretagne ou Office of War Information aux États-Unis en 1942), mais elles déploient également un arsenal à destination de l’étranger pour conduire la « guerre psychologique » contre les forces de l’Axe. La radio y joue un rôle d’autant plus fondamental que les nazis en ont fait un outil de conditionnement des masses.


De manière significative, dès septembre 1938, devant la montée du danger hitlérien, le chef du gouvernement français, Édouard Daladier, impose un contrôle strict des informations non seulement sur les postes d’État, mais aussi sur les postes privés. Lorsque l’offensive allemande se déclenche, les émissions en français de Radio-Stuttgart (Radio-Humanité) suscitent un vent de panique au plus haut niveau de l’État, alors que rien ne permet d’affirmer qu’elles sont effectivement écoutées. De même, en Grande-Bretagne, les autorités s’alarment des harangues de « Lord Haw-Haw » (William Joyce), un Américain converti au nazisme, qui s’adresse aux Britanniques depuis une station de Hambourg. C’est notamment pour lui répliquer que la BBC, à partir du 16 juin 1940, ouvre chaque dimanche soir son antenne au romancier John B. Priestley. Ses chroniques, qui exaltent l’héroïsme de ses concitoyens et n’hésitent pas à transformer la débâcle de Dunkerque en victoire de tout un peuple, sont suivies par 15 à 16 millions d’auditeurs, soit davantage que les allocutions de Churchill.


L’essor de la propagande relève alors davantage de l’engrenage que d’un projet pensé en amont. Rapidement néanmoins, les démocraties se lancent dans une guerre psychologique à outrance, comme en attestent les programmes en vingt-trois langues de la BBC, ou en vingt-sept de Voice of America, voire, plus encore peut-être, les stations « noires » britanniques, qui diffusent en plusieurs langues, dont l’allemand (à partir de mai 1941), et sont censées être animées depuis le territoire du Reich par des opposants à Hitler21 ! Certaines visent particulièrement les soldats et les marins allemands22.


La vérité contre la propagande

La question est alors de savoir si les émissions sont écoutées et si cette « contre-propagande » a ou non un impact. Reprenons alors les rapports des préfets français. Même si le phénomène s’intensifie à compter de l’automne 1942, on observe que, dès le début de 1941, « les radios gaullistes et britanniques restent très écoutées23 » ; au cours de l’année, les préfets demandent périodiquement un renforcement de leur brouillage (ce qui est fait en décembre 1941). Mais à vrai dire, elles ne sont pas les seules. À partir de l’été 1942, il est fréquemment fait allusion à la « radio américaine » (son audience, cependant, est bien moindre que celle de la BBC) et, après Stalingrad, à Radio-Moscou : « Les émissions de Moscou sont écoutées, même dans les milieux bourgeois24. » Cependant, selon les préfets, la station étrangère la plus suivie demeure, durant toute l’Occupation, Radio-Sottens, qui émet depuis la Suisse. C’est vrai dans les départements de l’Est (Territoire de Belfort, Doubs, Haute-Saône), mais pas exclusivement. Ce que viennent y chercher les auditeurs, c’est d’abord une information qui ne soit pas tronquée25. La vertu accordée à la radio helvétique est d’« exprimer vraiment la vérité sur les graves questions du moment » et « de donner aux auditeurs des renseignements sincères sur l’évolution des opérations et la situation des belligérants »26. Bref, le contraire de la propagande.


Dans ce contexte, Radio-Londres est-elle influente ? Sa portée morale peut être en partie évaluée à l’aune de la manière dont les Français répondent à ses consignes. La manifestation patriotique du 14 juillet 1942 lancée par la radio britannique, l’une des voix de la France libre, touche ainsi soixante-dix villes : 150 000 Lyonnais, 100 000 Marseillais, 30 000 Toulousains, etc. Sa présence, sous la plume des préfets, contraste avec l’absence des journaux clandestins, même compris sous le mot de « tracts ». Cela ne signifie pas que ceux-ci sont sans effet sur la population, mais leur dispersion est peu compatible avec des mots d’ordre généraux de mobilisation de l’opinion. Ils agissent avant tout comme des médias de « proximité », ce qui leur permet d’être parfois plus réactifs que la BBC, comme le montre le cas de l’insurrection parisienne en août 194427.


Malgré la propagande alliée, l’Allemagne ne s’effondre pas

Les Alliés ont misé sur l’effondrement psychologique de l’Allemagne et s’en sont donné les moyens. Outre la propagande subversive et les stations « noires », ils tablaient également sur les largages massifs de tracts de l’aviation américaine sur l’armée et la population allemandes, dès 1943. Le capitaine James Monroe met d’ailleurs au point des « bombes » pouvant transporter chacune jusqu’à 80 000 tracts ! On sait par ailleurs qu’une partie des Allemands écoutent la BBC, la station suisse de Beromünster ou Radio-Moscou. Une enquête menée en Hesse par l’armée américaine, en avril-mai 1945, montre que plus de la moitié des personnes interrogées se branchent sur les radios étrangères dans les dernières semaines du conflit28. Et pourtant, l’effondrement moral, malgré les bombardements, les destructions, la pénurie de denrées, ne vient pas.


L’encadrement psychologique conduit depuis des années par les nazis sur la population allemande peut être avancé comme un facteur d’explication. Les autorités du Reich savent aussi habilement retourner la propagande alliée : au lieu de les interdire, et donc de leur donner du crédit, elles laissent circuler les tracts alliés et s’en servent pour bâtir une contre-propagande fondée sur le mensonge de l’ennemi29.


À la fin de la guerre, des enquêtes sont menées par les Américains et les Britanniques sur les soldats allemands qui se rendent pour évaluer l’efficience de leur propagande. Les résultats restent fragiles, et parfois contradictoires. De juin 1944 à début 1945, il apparaît ainsi que 60 % d’entre eux font confiance à Hitler ; en février 1945, 40 % pensent encore que l’Allemagne gagnera la guerre. Une autre enquête, effectuée en 1945, indique que seulement 10 % d’entre eux affichent des convictions nazies, les trois quarts se montrant hostiles ou indifférents30. Comme se le demande Jacques Ellul, quel crédit accorder à de telles enquêtes ? « Il est enfantin de croire, note-t-il, que ces hommes ont dit la vérité simplement parce qu’on leur garantissait un anonymat, ou l’impunité, en face de telle déclaration. […] Ils vivaient forcément dans un univers de combat, de mensonge, d’engagement, alors que les enquêteurs se plaçaient forcément (et voulaient se placer) dans un univers libéral, dégagé, et de transparence : ce malentendu vicie toutes les conclusions de ces enquêtes31. »


La bonne propagande prêche des convaincus

Au fond, la seule propagande un tant soit peu efficace est celle qui, restant à usage interne, rencontre les convictions de l’opinion. Ainsi en va-t-il de l’entrée en guerre des États-Unis, alors qu’aux manœuvres de Roosevelt s’oppose la propagande isolationniste d’American First (800 000 adhérents). Certes, en octobre 1939, 69 % des Américains se disent hostiles à une entrée en guerre, mais déjà 52 % l’estiment inévitable. Dès novembre 1939, la part des isolationnistes tombe à 49 %. À cette époque, huit Américains sur dix regardent l’Allemagne comme la seule responsable de la guerre. Entre mai 1940 et novembre 1941, la part des Américains acceptant l’aide à l’Angleterre passe d’un tiers à environ 70 %. Avant même Pearl Harbor, en octobre 1941, 84 % d’entre eux sont persuadés que leur pays entrera dans le conflit32. Dès lors, la propagande soutenant l’effort de guerre peut se développer, relayée par tous les médias, imprégnant en profondeur l’imaginaire commun. Il en va de même en Grande-Bretagne, où la propagande, distillée discrètement, notamment à la BBC où elle colore tous les programmes, fait écho à ce que veut entendre l’auditeur33.


Au total, c’est la croyance en la toute-puissance de la propagande, propre à modeler les esprits, voire à manipuler l’ennemi, qui la consacre durant la Seconde Guerre mondiale. Surestimer son rôle serait un contresens, mais la réduire à quantité négligeable conduirait également à une erreur de jugement. Ce qui compte, au fond, c’est l’état de réceptivité des opinions. Le propagandiste efficace est celui qui sait utiliser l’imaginaire de son interlocuteur pour l’entraîner dans le sien propre. Les techniques les plus sophistiquées ne peuvent rien contre celui qui croit fermement en la victoire ou refuse d’être soumis. Même le mensonge a ses limites. Ainsi Goebbels, ministre de la Propagande du Reich, ne peut transformer la débâcle de Stalingrad en victoire, comme l’indique son discours du Sportpalast de Berlin, le 18 février 1943, où les mots répétés de « crise » et de « malheur » servent de socle à l’appel à la « guerre totale ». Comme il le reconnaissait déjà lui-même deux ans plus tôt, au moment de la fuite de Rudolf Hess : « Il y a des situations contre lesquelles le meilleur propagandiste ne peut rien34. »


Bibliographie sélective

Eck, Hélène (dir.), La Guerre des ondes. Histoire des radios de langue française pendant la Deuxième Guerre mondiale, Paris, Communauté des radios publiques de langue française et Armand Colin, 1985.


Ellul, Jacques, Propagandes, Paris, Economica, 1990 (1re éd. 1962).


Favre, Muriel, La Propagande radiophonique nazie, Paris, INA Éditions, 2014.


Laborie, Pierre, L’Opinion sous Vichy, Paris, Le Seuil, 1990.


Lerner, Daniel (dir.), Propaganda in War and Crisis, New York, George W. Stewart Publisher Inc., 1951.


Rhodes, Anthony, Histoire mondiale de la propagande de 1933 à 1945, Bruxelles, Elsevier, 1980.


—, La Propagande dans la Seconde Guerre mondiale, Paris, Presses de la Cité, 1989 (Manchester University Press, 1986).


Shulman, Holly Cowan, Voice of America, Propaganda and Democracy, 1941-1945, Madison (Wisconsin), University of Wisconsin Press, 1990.


Vallée, Cécile, « La propagande cachée sur les ondes de la BBC pendant la Seconde Guerre mondiale : vers une héroïsation nationale », Revue LISA e-journal, vol. IV, no 3, 2006 (en ligne : https://lisa.revues.org/2025).


Welch, David, The Third Reich. Politics and Propaganda, Londres, Routledge, 2002.


1. La Propagande, nouvelle force politique, Paris, PUF, 1950, p. 4.


2. La Propagande politique, Paris, PUF, 1959, p. 5.


3. Pierre Laborie, L’Opinion sous Vichy, Paris, Le Seuil, 1990.


4. AN F1a/3705, synthèse des rapports de préfets, zone occupée, avril 1941.


5. AN F1a/3705, synthèse des rapports de préfets, zone occupée, mai 1941.


6. Cf. Denis Peschanski, « Contrôler ou encadrer ? », Vingtième Siècle, revue d’histoire, no 28, octobre-décembre 1990, p. 65-76.


7. AN F1a/3705, synthèse des rapports de préfets, zone occupée, janvier 1942.


8. AN F1a/3705, synthèse des rapports de préfets, zone occupée, novembre 1941.


9. Ibid.


10. AN F1a/3705, synthèse des rapports de préfets, zone occupée, janvier 1942.


11. AN F1a/3705, synthèse des rapports de préfets, zone libre, avril 1942.


12. AN F1a/3705, synthèse des rapports de préfets, zone libre, mai 1942.


13. Jean-Pierre Bertin-Maghit, Les Documenteurs des années noires, Paris, Nouveau Monde éditions, 2004, p. 69 et suivantes.


14. AN F1a/3705, synthèse des rapports de préfets, zone libre, janvier 1942.


15. AN F1cIII/1198, synthèse des rapports de préfets, zone occupée, novembre 1942.


16. AN F1a/3705, synthèse des rapports de préfets, zone libre, octobre 1942.


17. AN F1a/3705, synthèse des rapports de préfets, zone occupée, janvier 1943.


18. AN AJ41/18, synthèse des rapports de préfets, zone occupée et zone libre, février 1944.


19. AN AJ41/18, synthèse des rapports de préfets, zone occupée, juin 1944.


20. Cf. Jean-Paul Grémy « Les sondages clandestins de la Résistance en France occupée au début de l’année 1944. Chapitre 4 : “L’impact des éditoriaux de Philippe Henriot” », 2012 (https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00701976).


21. Le maître d’œuvre en est le journaliste Sefton Delmer, qui déclare le 20 septembre 1941 : « La guerre totale des radios est commencée. Je suis sûr que nous pouvons faire mieux qu’eux [les Allemands]. »


22. Ex. Wehrmachtsender Nord, Soldatensender Calais.


23. AN F1a/3705, synthèse des rapports de préfets, zone libre, mars 1941.


24. AN F1a/3705, synthèse des rapports de préfets, zone libre, février 1943.


25. La presse suisse est également beaucoup lue.


26. AN F1a/3705, synthèse des rapports de préfets, zone libre, juin 1942.


27. Cf. Olivier Wieviorka, « La presse clandestine », dans Mélanges de l’École française de Rome. Italie et Méditerranée, t. 108, no 1, 1996, p. 135.


28. Cf. Muriel Favre, La Propagande radiophonique nazie, Paris, INA Éditions, 2014.


29. Bernard Berelson et Morris Janowicz, « Cohesion and desintegration in the Wehrmacht in Word War II », Reader in Public Opinion, New York, Free Press, 1966 (2e éd.), p. 402-417.


30. Cf. Daniel Lerner (dir.), Propaganda in War and Crisis, New York, George W. Stewart Publisher, Inc., 1951.


31. Jacques Ellul, Propagandes, Paris, Economica, 1990 (1re éd. 1962), p. 293.


32. Cf. Jerome S. Bruner, Ce que pense l’Amérique (Mandate from the people), Paris, PUF, 1945.


33. Cf. Cécile Vallée, « La propagande cachée sur les ondes de la BBC pendant la Seconde Guerre mondiale : vers une héroïsation nationale », Revue LISA e-journal, vol. IV, no 3, 2006 (en ligne : https://lisa.revues.org/2025).


34. Cité par Jacques Ellul, Propagandes, op. cit., p. 308.

沒有留言:

張貼留言

注意:只有此網誌的成員可以留言。

1945雅爾達會議有哪些解讀

1945雅爾達會議有哪些解讀 ChatGPT 說: 下面整理  1945 年雅爾達會議(Yalta Conference)最常見、影響最大的多種解讀角度 ,涵蓋國際史、冷戰史、外交決策、陰謀論與結構性學派等不同視野,方便你用於評論、投書或論述延伸。 🇺🇸🇬🇧🇷🇺  1...